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Un plan pour ramer dans la même direction

Par André Dumouchel

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Avec l’été qui s’installe et le retour de la chaleur, le nouveau Plan national de l’eau du gouvernement du Québec a quelque chose de rafraîchissant.

Rafraîchissant, parce qu’il est le fruit d’un travail d’équipe. Il est bien difficile, dans ce cas-ci, de reprocher au gouvernement d’avoir travaillé en vase clos, comme cela arrive trop souvent. Les représentants d’une vingtaine d’organismes de différents horizons et de trois ministères ont collaboré avec celui de l’Environnement pour cibler 40 mesures à réaliser et 7 orientations principales. Sachant combien il est difficile d’obtenir un consensus, on ne peut que saluer ce travail de concertation de haut niveau.

Cela démontre non seulement que toutes et tous sont prêts à ramer dans la même direction, mais également qu’il est possible de s’entendre et de parler d’une même voix. La campagne de sensibilisation Pensez bleu, l’une des mesures du Plan, en est d’ailleurs un bon exemple.

Mais, on s’en doute, protéger les ressources en eau est une tâche colossale. Il faut agir sur tellement de fronts à la fois! Lutter avec les effets des changements climatiques, neutraliser les contaminants nocifs non normés (comme les tristement célèbres PFAS) et réduire la pollution agricole diffuse ne sont que quelques exemples parmi la longue liste de priorités.

À eux seuls, le renouvellement et la mise à jour des infrastructures d’eau potable et d’eaux usées nécessitent d’ailleurs des investissements monumentaux. Les sommes à investir se comptent en milliards, comme le souligne à juste titre le président-directeur général de Réseau Environnement, Mathieu Laneuville, dans le reportage principal de ce magazine.

Les besoins sont grands, reconnaît d’emblée Caroline Robert, directrice générale à la Direction générale des politiques de l’eau au ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs.

À la lumière de ce constat, le budget de 500 millions de dollars alloué à la mise en œuvre des différentes mesures du Plan national de l’eau peut sembler une goutte d’eau dans l’océan. Le gouvernement reconnaît d’ailleurs que cette somme ne permettra pas de répondre à tous les enjeux.

Et cette lucidité a, elle aussi, quelque chose de rafraîchissant. Voyons donc comment le Plan pourra se déployer, fournir les outils, les connaissances et les solutions nécessaires aux enjeux ciblés. Mais il faudra inévitablement que les investissements – et peut-être des mesures coercitives ayant un peu plus de mordant – suivent pour permettre d’aller plus loin dans l’atteinte des objectifs.

La création du Fonds bleu, en 2024, dans la foulée de la hausse de la redevance imposée aux entreprises qui prélèvent de grandes quantités d’eau au Québec, constitue d’ailleurs un pas dans la bonne direction. Il faut saluer l’initiative, mais il ne faut surtout pas s’arrêter là.

Une partie de la solution

Tôt ou tard, il faudra sérieusement envisager l’installation élargie de compteurs d’eau. C’est assurément une partie de la solution, ne serait-ce que pour suivre le parcours de l’eau. Je suis convaincu que, sans ce précieux outil, il est bien difficile de protéger la ressource, comme le vise le Plan national de l’eau.

Si on veut inciter les citoyens et les entreprises à changer leurs comportements, encore faut-il que leur consommation d’eau soit rendue concrète et mesurable. Et les coûts astronomiques liés à la production d’eau potable doivent y être associés.

Il est plus que temps de cesser de croire, collectivement, que l’eau est une ressource abondante, inépuisable et, surtout, gratuite. Certaines municipalités qui connaissent des pénuries d’eau le savent déjà trop bien. Leurs citoyens aussi.

Même si leur efficacité n’est plus à démontrer, les compteurs d’eau continuent de se heurter à une résistance sur le plan de l’acceptabilité sociale. Les réticences demeurent fortes, comme l’a rapporté La Presse dans une série de reportages parus en avril dernier. Le fameux scandale des compteurs d’eau, survenu à Montréal dans les années 2000, a laissé des traces. L’outil est devenu un triste symbole de corruption qui semble refroidir certains élus.

L’organisme Réseau Environnement y voit pour sa part une solution rapide et peu coûteuse pour réduire la consommation d’eau. Un point de vue que nous partageons et que nous encourageons.

Il y aura toujours des citoyens qui adopteront des comportements irresponsables face à l’eau. Mais on peut croire qu’ils seraient peut-être moins nombreux à nettoyer leur entrée de cour ou leur stationnement au boyau si leur consommation d’eau était mesurée par un compteur.

Sur ce, allons nous baigner. Bon été !

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