Réseau EnvironnementPourquoi les redevances sur l’eau promettent de faire parler d’elles en 2023

Pourquoi les redevances sur l’eau promettent de faire parler d’elles en 2023

Par Mathieu Laneuville

En déposant le projet de loi 42 en juin dernier, le gouvernement du Québec faisait un pas en avant dans la protection de notre richesse collective en eau potable. Il s’avançait alors sur une demande de longue date du milieu environnemental relativement à la nécessité de revoir les redevances tirées de l’utilisation de grandes quantités d’eau par des entreprises privées établies au Québec. Le projet de loi 42 prévoyait une révision tous les trois ans des redevances perçues pour l’utilisation d’eau et le dévoilement au public des mesures financées par ces mêmes redevances.

Motivé par l’intime conviction que nos ressources en eau doivent être pérennisées ainsi que par l’intérêt avéré du gouvernement pour la question, Réseau Environnement a mobilisé ses membres pour réfléchir à la bonification du système de redevances sur le prélèvement d’eau. Pour l’occasion, un comité de spécialistes composé de gestionnaires d’infrastructures municipales et de représentantes et représentants de municipalités, du milieu universitaire, de la société civile et du secteur privé s’est réuni afin de discuter des dispositions du règlement en vigueur et des recommandations à mettre de l’avant pour l’améliorer. Dans les prochains paragraphes, j’en reprends les grandes lignes afin de vous présenter cet enjeu qui promet de revenir au programme législatif dans la nouvelle année.

L’abondance de l’eau est un mythe qui doit être déboulonné. Tant en matière de quantité que sur le plan de la qualité, cette ressource collective se trouve sous pression. Il s’agit d’une ressource limitée, non renouvelable, sur laquelle repose notre prospérité économique, mais qui est aussi à la source de la santé de nos collectivités et de la durabilité de nos écosystèmes. Les spécialistes du consortium scientifique Ouranos nous avertissent même des risques grandissants de pénurie d’eau potable au Québec dans les prochaines décennies1. L’eau doit être protégée : c’est un devoir dicté par la Loi sur l’eau.

La Loi sur l’eau établit quatre principes directeurs devant guider le gouvernement dans ses efforts de gestion de l’eau, dont celui de l’utilisateur-payeur. Ce principe vient soutenir le développement d’instruments économiques pour rendre redevables les usagers au sujet de leur utilisation de l’eau et de l’éventuelle détérioration qu’ils occasionnent. Les redevances visent à internaliser les coûts supportés par l’environnement dus au prélèvement et à la pollution des ressources en eau. Ce système incitatif est destiné à envoyer un signal de prix aux usagères et usagers pour démontrer la valeur de la ressource et les amener à modifier leurs comportements. Les recettes perçues par les redevances sont ensuite redistribuées sous forme d’aides financières aux actrices et acteurs qui agissent pour la protection et la restauration de l’eau et des milieux aquatiques. Elles peuvent aussi financer les politiques liées à l’eau, notamment pour soutenir l’acquisition de connaissances sur la quantité et la qualité des réserves d’eau et des écosystèmes aquatiques.

Quelques-unes des recommandations de Réseau Environnement portent sur un élément critique pour l’efficacité de notre système de gestion de l’eau : la transparence.

La base d’une bonne gestion passe par la maîtrise des données. Il est primordial d’équiper nos industries d’instruments de mesure afin de connaître les volumes d’eau prélevés et ainsi de mieux gérer l’utilisation de la ressource à l’échelle du bassin versant. Réseau Environnement recommande de demander à toute industrie prélevant plus de 10 m³ d’eau par jour de déclarer ses prélèvements, puis de compiler cette information dans un registre dont un bilan régional pourrait être rendu public. Sans que la redevance s’applique aux plus petits consommateurs, la collecte et l’utilisation de données doivent se faire dans l’objectif de pérenniser la ressource.

Il est également important de rendre publique l’utilisation faite des fonds tirés de la redevance. Privilégier le réinvestissement dans des projets de protection de la ressource favoriserait la mise en place de solutions concrètes aux problèmes de conservation auxquels nous faisons face.

Dans les semaines et les mois à venir, vous pourrez compter sur Réseau Environnement pour continuer ses efforts de sensibilisation autour de la gestion durable de notre eau potable. Grâce à notre fine expertise et à un brin de volonté, nous pourrons faire de l’année 2023 celle de l’excellence en gestion de l’eau !

  1. Alberti-Dufort, A., Bourduas Crouhen, V., Demers-Bouffard, D., Hennigs, R., Legault, S., Cunningham, J., Larrivée, C. et Ouranos. (2022). Québec ; Chapitre 2. Dans F.J. Warren, N. Lulham, D.L. Dupuis et D.S. Lemmen (éd.), Le Canada dans un climat en changement : le rapport sur les perspectives régionales. Gouvernement du Canada. https://changingclimate.ca/site/assets/uploads/sites/4/2020/11/QC_CHAPITRE_FR_v7.pdf

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