Dans les derniers mois, de nouveaux contaminants sont apparus de façon marquée dans les médias : les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). Les PFAS ont fait la manchette à plusieurs égards : en premier lieu, en lien avec des boues d’épuration en provenance des États-Unis qui étaient « traitées » au Québec et qui se sont avérées être contaminées aux PFAS ; ensuite, après la découverte de PFAS dans l’eau potable de certaines municipalités.
Les PFAS ne sont pas nouveaux, étant présents dans notre environnement depuis près de 80 ans. Or, ils posent deux difficultés. D’abord, études à l’appui, les scientifiques les ont maintenant associés à de nombreux problèmes de santé, y compris le cancer. Ensuite, les PFAS sont des molécules éternelles, donc pratiquement impossibles à dégrader. Puisqu’ils sont toujours utilisés dans l’industrie, ils s’accumulent graduellement dans l’environnement.
Des milliers de molécules sont englobées sous la terminologie « PFAS ». Elles ont en commun d’inclure au moins un groupe perfluoroalkyle, –CnF2n–. En fonction des combinaisons atomiques, les PFAS peuvent être très différents aussi bien du point de vue de leur taille que de celui de leur effet sur la santé. Selon Santé Canada, ils peuvent affecter tant le foie, le système immunitaire, les reins, la thyroïde, les fonctions métaboliques ou la fertilité que le cholestérol.
Spécifiquement, les PFAS ont été (et sont encore) utilisés pour différentes applications, y compris les vêtements avec imperméabilisants ou déperlants, les poêles antiadhésives, les emballages alimentaires et les mousses filmogènes aqueuses anti-incendie (AFFF). Ainsi, les principales sources dans l’environnement sont :
- Les installations industrielles produisant ou utilisant des PFAS ;
- Toutes les contaminations indirectes, dont les sites d’utilisation ou de stockage de mousses AFFF, les rejets de stations d’épuration, les sites d’enfouissement, les sites d’épandage, etc.
La séparation
Différents procédés peuvent être utilisés pour séparer les PFAS d’un affluent liquide, y compris les procédés membranaires comme l’ultrafiltration (UF) ou l’osmose inverse (RO). Des procédés de flottation sont également utilisés pour traiter des rejets ayant des concentrations très élevées de PFAS. Dans tous les cas, après cette première phase de traitement, les PFAS demeurent en phase liquide, mais concentrés dans un volume réduit. La concentration du contaminant dans un plus petit volume peut simplifier le traitement subséquent d’extraction ou réduire les coûts de transport d’eau contaminée vers un autre site de traitement ou de disposition. C’est aussi durant ou avant cette étape que l’on essaie de séparer les autres substances qui pourraient nuire à l’extraction, étant compétitives avec les PFAS.
L’extraction
Afin d’extraire les PFAS de l’eau, deux technologies d’absorption en filtre sous pression sont principalement utilisées : les résines échangeuses d’ions (IX) et le charbon actif en grain (CAG). L’étape d’extraction est généralement la plus coûteuse, il faut donc porter beaucoup d’attention au choix du procédé. Dans les deux cas, un des enjeux est la durée de vie du média, surtout en présence d’autres contaminants.
Les résines échangeuses d’ions chargés positivement sont particulièrement efficaces pour capter les PFAS acides (sulfoniques). Les résines sont aussi plus efficaces que le CAG et demandent donc un volume de filtre plus petit. Également, leur durée de vie est généralement plus grande.
Le charbon actif a l’avantage d’être moins coûteux. Toutefois, son utilisation est moins adaptée aux eaux de surface chargées en carbone organique total (COT) présent à des niveaux de mg/L, en comparaison avec les PFAS (en ng/L), compétitionnant pour les mêmes sites.
La configuration des filtres doit également être considérée, particulièrement pour des volumes importants à traiter. Lors des changements de médias, il est essentiel de nettoyer parfaitement la paroi des filtres pour éviter tout risque de contamination de l’effluent. Cette démarche peut être très ardue, particulièrement avec la conception traditionnelle, qui nécessite parfois un nettoyage en espace clos. Des solutions existent toutefois pour minimiser ce type de manipulation. Peu importe le mode d’absorption, un autre enjeu découle des variations en capacité d’absorption pour les différents types de PFAS. On ne peut donc pas mettre tous les PFAS sur un pied d’égalité. Il est essentiel d’avoir une caractérisation complète de l’affluent pour pouvoir en faire un traitement adapté.
La destruction
La destruction des PFAS implique principalement l’incinération du média contenant les PFAS. Avec une combustion à 850 OC, la grande majorité des composés sont réduits à leur forme élémentaire, y compris les PFAS. L’incinération a aussi l’avantage d’être exothermique et de réduire énormément le volume des déchets traités. Les résultats ne sont pas toujours parfaits, principalement dans les cas impliquant les PFAS des mousses AFFF. C’est toutefois la méthode la plus adaptée de nos jours. D’autres procédés tels l’oxydation électrochimique, les ultraviolets, supercritique ou des plasmas sont mis de l’avant par différents chercheurs et fournisseurs. Pour l’instant, il n’existe pas de recette miracle peu énergivore.
Conclusion
En présence de PFAS, il est essentiel d’aborder le problème pour chaque site de façon spécifique, particulièrement lorsqu’il s’agit d’eau potable. La mise en place d’une stratégie de traitement des PFAS nécessite une analyse complète de l’eau et des types de PFAS présents. De plus, il faut tenir compte des particularités du site, y compris la proximité d’un incinérateur. Comme on le voit pour certains des puits contaminés au Québec, le plus simple est souvent de changer de source d’eau, si c’est possible. Il est évident qu’une combinaison concertée d’actions citoyennes, de réglementation et de changements dans l’industrie devra être mise en place le plus rapidement possible pour réduire de façon drastique les PFAS à la source.