Les défis environnementaux actuels nécessitent plusieurs actions pour diminuer la consommation énergétique. Une de celles-ci implique le transfert et la récupération de chaleur issue de différents procédés physiques et chimiques : le traitement des eaux n’y fait pas exception. Cet article porte sur les échangeurs de chaleur dans le domaine du traitement des eaux.
Premièrement, les échangeurs de chaleur sont utilisés pour plusieurs applications dans le domaine de l’eau où se combinent deux fluides (l’un chaud, l’autre froid) : eau-eau, eau-boue, boue-boue, vapeur-eau, glycol-eau, etc. Pour ces applications, les échangeurs de chaleur sont construits en acier doux peint ou en acier inoxydable pour les applications à risque de corrosion, l’acier étant un matériau très résistant et idéal pour le transfert de chaleur.
Dans le domaine des eaux usées, les échangeurs de chaleur sont principalement utilisés pour augmenter la température de l’affluent chargé en matière organique (eau usée, lixiviat ou boue) afin de la maintenir à une valeur optimale (>20 °C) de manière à rehausser le taux de croissance des bactéries présentes dans le liquide mixte. Cette croissance accélérée des bactéries augmente leur consommation de matière organique et permet un enlèvement stable et « plus rapide » de celle-ci. Cette approche peut être utilisée pour différentes technologies, dont les réacteurs biologiques à garnissage, les réacteurs biologiques membranaires et les réacteurs biologiques séquentiels.
La digestion anaérobie requiert également un système d’échangeur de chaleur pour maintenir la boue à digérer à une température minimale, typiquement de 35 °C. La digestion anaérobie présente l’avantage de générer du méthane, qui peut être utilisé comme source de combustible pour le chauffe-eau alimentant l’échangeur de chaleur. Une digestion à température plus élevée (thermophile, soit 45-60 °C) peut également être envisagée, entre autres pour détruire les organismes pathogènes.
Lorsque de la boue est préalablement chauffée par de l’eau chaude provenant d’un chauffe-eau, on parle alors d’un échangeur de chaleur de type « eau-boue ». Pour ce type d’échange, on recommande très fortement l’utilisation d’un système « tube-tube » composé d’un serpentin de gros diamètre (>100 mm) dans lequel passe la boue et pour lequel les sections droites sont recouvertes d’autres tubes reliés entre eux dans lesquels passe l’eau chaude. Pour maximiser l’échange de chaleur, les deux liquides passent en sens inverse. Ces échangeurs de chaleur sont conçus de manière à minimiser tout risque de blocage du côté boue en ayant une section d’écoulement de gros diamètre et des vitesses élevées pour favoriser la turbulence, le transfert de chaleur et la friction sur les parois, et ce, afin d’être autonettoyants. Une bonne conception fait en sorte qu’il n’y a aucun joint d’étanchéité ou joint de soudure entre les deux fluides (boue et eau) afin de minimiser le risque de contamination. Les échangeurs doivent être conçus pour faciliter l’accès aux sections de tuyauterie du côté boue de façon à pouvoir les récurer avec une brosse. Une attention particulière doit être apportée à la température maximale de l’eau afin d’éviter la formation de croûte dans le tube. L’échangeur de chaleur de type « tube-tube » est également recommandé pour toutes les applications impliquant des eaux usées ou du lixiviat à chauffer avec de l’eau chaude.
Pour des applications boue-boue, un accès aux deux sections d’écoulement est requis. On recommande alors d’utiliser un système « à section d’écoulement surdimensionné » pour les deux fluides afin de minimiser le risque de colmatage. Typiquement, ce type d’échangeur de chaleur est composé de spirales ou de canaux surdimensionnés (minimum de 75 mm) de façon à permettre le passage de filasses et d’autres solides tout en maintenant des vitesses d’écoulement élevées pour éviter la sédimentation. Dans tous les cas, la maintenance sur ces échangeurs de chaleur est nécessairement plus fréquente et plus complexe que pour un échangeur de type « tube-tube ».
Les échangeurs de chaleur à plaques (espaces de <50 mm) sont adaptés aux échanges de chaleur impliquant uniquement de l’eau propre. Ce type d’échangeur est conçu avec des plaques mises côte à côte, entre lesquelles passe un fluide chaud et froid en alternance. Ces échangeurs de chaleur ont l’avantage d’être beaucoup plus compacts et abordables. Toutefois, ils sont inadaptés aux boues en raison du risque de colmatage qu’entraînent les espaces restreints. Aussi, ils présentent un risque plus élevé de contamination entre les fluides à cause des nombreux joints d’étanchéité qui sont requis pour séparer les deux fluides.
Certains procédés requièrent le refroidissement d’un fluide mis en contact avec une source de chaleur, par exemple des ozoneurs, des soufflantes turbo ou même des ordinateurs. Pour le refroidissement, lorsque le fluide est utilisé en boucle fermée, on se sert principalement d’échangeurs à plaques utilisant une combinaison d’eau et de glycol comme liquide de refroidissement afin de permettre une température d’eau de refroidissement sous 0 °C. Peu importe le procédé de refroidissement, il faut bien tenir compte de l’ensemble du système de transfert de chaleur, souvent accompagné d’un compresseur frigorifique (chiller), de tours de refroidissement et de pompes. Afin de simplifier le système, on peut envisager l’utilisation de sources plus simples d’accès comme de l’eau de surface ou, directement, l’air extérieur pour refroidir le procédé.
Avec les défis énergétiques qui nous attendent, on voit que le gouvernement a tout à gagner à mettre l’accent sur les énergies vertes et l’efficacité énergétique. Des équipements efficaces de transfert de chaleur seront de plus en plus demandés pour des applications de procédés industriels comme pour des applications biologiques. Enfin, ces procédés de transfert de chaleur prennent tout leur sens lorsque la chaleur en excès est récupérée pour une application complémentaire, comme le préchauffage de l’eau alimentant un chauffe-eau. Puisque chaque projet est unique, une synergie entre les différents intervenants (fournisseur, ingénieur, utilisateur) est nécessaire afin de développer des solutions innovantes pour répondre aux défis de demain.