Le monde de la gestion de l’eau potable et du traitement des eaux usées est très technique. Mais depuis 20 ans, Source démocratise ces enjeux pour faire en sorte que tous puissent mieux les comprendre. Maintenant que les changements climatiques se font sentir et que la population comprend l’importance de bien gérer l’eau et ses infrastructures, le magazine se révèle plus pertinent que jamais.
Créer un guide d’achat de compteurs d’eau pour les municipalités : voici l’idée qu’a eue André Dumouchel, fondateur du magazine Source, en 2005. Pourquoi ? Parce qu’il y avait de nombreux imposteurs dans le domaine et on voulait éviter que les villes se fassent escroquer. Il a confié le mandat à Mathieu Laneuville, alors ingénieur au ministère des Affaires municipales et de l’Habitation. « André m’avait donné carte blanche, j’avais apprécié sa confiance et le résultat a été gagnant, se souvient-il. Nous avions rassemblé l’ensemble des joueurs, y compris le secteur privé, pour nous entendre sur les éléments importants. Nous avons réussi à faire un outil utile, et le gouvernement recommandait aux municipalités de consulter ce guide. »
Directeur du Service des eaux de la Ville de Saint-Eustache, Yanick Fortier avait collaboré à la réalisation du Guide d’achat de compteurs d’eau. Il est bien placé pour témoigner de l’importance du magazine pour les municipalités et de son impact concret. « Source donne une information de qualité et réussit à trouver l’équilibre entre le côté technique et la vulgarisation, explique-t-il. C’est important que le magazine soit accessible. Saint-Eustache est une ville de taille moyenne, nous avons de l’expertise. Mais dans bien de petites municipalités au Québec, il n’y a pas de personnel technique : les employés portent plusieurs chapeaux et doivent comprendre les enjeux pointus qui touchent à l’eau. »
« Dans l’industrie, tout le monde est branché sur le magazine, tout le monde le connaît, il fait partie de notre environnement »
— Georges Szaraz, président-directeur général de Mabarex
Faire évoluer la société
Yanick Fortier constate également qu’au fil des ans, des reportages marquants ont secoué le secteur, mais aussi la population en général. Citons par exemple celui paru il y a quelques années sur le manque d’eau à Saint-Lin–Laurentides.
« Cet article a changé la donne, parce qu’on ne parlait pas d’une ville obscure à l’autre bout du monde, raconte-t-il. Il n’y a pas si longtemps, bien des gens arrosaient leur asphalte au Québec. Aujourd’hui, s’ils le font, ils sont stigmatisés. De plus en plus, les gens se rendent compte que c’est possible qu’on manque d’eau. Le concept d’utilisateur-payeur commence à entrer dans les mœurs alors qu’avant, on ne pouvait même pas en parler. Source contribue à l’évolution de la société. »
Aux yeux de Grégory Pratte, vulgarisateur, chroniqueur et conférencier dans le domaine de l’environnement pour différentes tribunes, les différentes éditions du magazine au fil des 20 dernières années permettent de voir l’évolution de la société dans le domaine de l’eau.
« Les choses se sont améliorées en 20 ans, mais il y a des défis, dit-il. On fait face à une crise en ce moment. Nos infrastructures, on ne leur a pas donné d’amour. Il faut les moderniser. Puis, il faut mieux gérer l’eau de pluie. On réalise aussi qu’il y a des villages qui n’ont plus d’eau au Québec. Il y aura des décisions à prendre, et Source est un bel espace pour expliquer les enjeux et explorer différentes avenues. Le magazine peut influencer les décisions. »
Découvrir de nouvelles technologies
Comme la gestion du secteur de l’eau dépend beaucoup des technologies, le magazine permet de découvrir les nouveautés en la matière. Par exemple, Clément Cartier, représentant technique de l’entreprise Brault Maxtech, rédige une chronique dans chaque édition de Source.
« Comme on représente des manufacturiers des différents endroits dans le monde, nous avons une vision large de ce qui existe comme technologies, alors Clément présente dans Source de nouvelles solutions qui ne sont pas encore nécessairement présentes au Québec », indique Nicolas Minel, président-directeur général de Brault Maxtech. Par exemple, en ce moment, les boues d’épuration sont particulièrement d’intérêt. « Beaucoup de nouveaux équipements arrivent sur le marché pour récupérer de l’énergie à partir des boues d’épuration, explique l’expert. Le traitement de l’eau a aussi grandement évolué. Aujourd’hui, il se fait beaucoup de traitement biologique pour les polluants qu’on ne voit pas, comme les médicaments. »
Nicolas Minel est proche de Source depuis ses premières éditions alors qu’il travaillait dans une autre entreprise du secteur. « Le magazine a toujours été près des fournisseurs de technologies, il leur a toujours donné la parole, raconte-t-il. C’est important, parce que les gens des villes le lisent. Il y a plusieurs revues intéressantes dans le domaine de l’eau, mais Source est très ancrée dans son territoire. C’est comme le trait d’union entre les entreprises québécoises du secteur de l’eau, les institutions et les villes. »
Chez Nordikeau, qui accompagne plus de la moitié des 800 municipalités au Québec détenant un service public d’eau potable et d’assainissement, le président Jean-François Bergeron participe pour sa part régulièrement à des reportages dans le magazine, et ce, depuis ses débuts, il y a 20 ans. « Par exemple, récemment, nous avons parlé du problème de pertes d’eau sur les réseaux d’aqueducs municipaux, indique-t-il. C’est un enjeu important, parce que la performance des réseaux québécois est déplorable. Bien qu’il soit impossible d’atteindre l’étanchéité à 100 %, un objectif minimum devrait être d’atteindre 80 %, alors qu’on est plutôt entre 60 et 80 % au Québec. »
À ses yeux, Source présente bien les grands enjeux liés à l’eau au Québec. « C’est fait de façon accessible et c’est lu aussi, affirme-t-il. Lorsqu’on va dans les bureaux municipaux partout à travers la province, on voit le magazine dans le hall d’entrée. »
« Source est très ancrée dans son territoire. C’est comme le trait d’union entre les entreprises québécoises du secteur de l’eau, les institutions et les villes. »
— Nicolas Minel, président-directeur général de Brault Maxtech
Des expertises pointues
Le magazine permet aussi à des personnes qui ont des expertises pointues de prendre la parole au bénéfice de plusieurs acteurs du secteur. Par exemple, Hélène Lauzon, présidente-directrice générale du Conseil patronal de l’environnement du Québec (CPEQ), est avocate et a écrit une chronique juridique dans Source et dans 3Rve pendant plusieurs années. Elle poursuit cette collaboration par l’organisme qu’elle préside, notamment lorsqu’une nouvelle politique publique, une nouvelle loi ou un nouveau règlement est adopté : le CPEQ utilise alors sa tribune pour l’expliquer. « Par exemple, nous avons écrit un article l’an dernier sur l’augmentation des redevances sur l’eau, indique Me Lauzon. Nous expliquions quel était l’impact pour les entreprises. »
Le CPEQ a aussi écrit sur la responsabilité élargie des producteurs, obligeant les entreprises qui mettent les produits visés sur le marché (ex. : piles, téléphones, réfrigérateurs) à récupérer et à valoriser ces derniers. Si l’article est court dans le magazine, le travail derrière est toutefois de taille. « C’est lu par les entreprises et elles doivent pouvoir s’y fier, affirme Hélène Lauzon. Il faut donc faire de multiples vérifications pour s’assurer que tout est exact. »
Le Centre d’expertise et de recherche en infrastructures urbaines (CERIU) publie aussi sa chronique dans Source depuis plusieurs années. « Nous avons plusieurs personnes qui ont des expertises notamment en infrastructures souterraines ou de surface, et elles ont beaucoup d’information à partager avec le lectorat de Source », indique Danielle Globensky, conseillère en communication au CERIU. Selon elle, le magazine est une tribune importante pour promouvoir les bonnes pratiques dans le domaine des infrastructures urbaines en eau. « Nous avons par exemple des guides et des formations à faire connaître, indique-t-elle. Ce sont surtout les municipalités qui lisent le magazine, alors c’est intéressant pour nous. Nous voulons les aider à mieux gérer leurs actifs. Le magazine est aussi souvent lancé lors d’événements importants du secteur, alors c’est un incontournable. Il faut y être présent pour rayonner. »
La centrale. C’est le mot qui vient en tête à Georges Szaraz, président-directeur général de Mabarex, un manufacturier d’équipements de traitement des eaux, lorsqu’il souhaite décrire Source. « Dans l’industrie, tout le monde est branché sur le magazine, tout le monde le connaît, il fait partie de notre environnement », affirme-t-il.
Très niché, le magazine a sa pertinence aux yeux de M. Szaraz. « Si quelque chose d’important se passe dans l’industrie, Source va en parler. On n’est pas obligé de fouiller sur Internet pour trouver l’information. Je pense par exemple à un changement réglementaire, mais aussi aux avancées technologiques. Le magazine couvre bien tout ça et il vient clairement répondre à un besoin. »
Des vidéos marquantes
Lorsqu’ils ont pensé aux 20 ans de Source, plusieurs collaborateurs et collaboratrices du magazine ont mentionné la production de vidéos par MAYA communication et marketing (l’éditeur de 3Rve et de Source). Mathieu Laneuville se souvient notamment d’avoir eu à expliquer la Stratégie québécoise d’économie d’eau potable en une minute. « La série de vidéos s’appelait Dans mon sous-sol et était tournée avec un sofa en velours vert, raconte-t-il en riant. On a eu beaucoup de plaisir à tourner ces capsules et elles étaient vues ! Cette capsule avait été regardée des milliers de fois. »
« Lorsqu’on va dans les bureaux municipaux partout à travers la province, on voit le magazine dans le lobby. »
— Jean-François Bergeron, président de Nordikeau
Partir sur les chapeaux de roue
Source a commencé fort – très fort. En page couverture de la première édition, on trouvait nul autre que Thomas Mulcair, alors ministre de l’Environnement du Québec. « Je n’avais aucun lien avec lui ni avec le parti libéral, mais j’avais osé lui demander une entrevue et il avait accepté, se souvient André Dumouchel, fondateur du magazine. Généralement, les gens ne veulent pas prendre le risque d’embarquer dans quelque chose qui n’existe pas encore. C’était très cool qu’il accepte de se prêter au jeu. Je lui avais posé plein de questions sur son poste de ministre et sur les enjeux liés à l’eau. »
Cela n’a pas été sans impressionner l’ami du secondaire d’André Dumouchel, Grégory Pratte. « Il y avait plusieurs personnes importantes qui contribuaient au magazine dès ses débuts », affirme celui qui s’est ainsi laissé convaincre de rejoindre l’équipe de MAYA communication et marketing.
André Dumouchel se souvient aussi de s’être rendu en France pour l’une des éditions du Salon Pollutec, et d’en avoir profité pour interviewer Hubert Reeves. « Il y avait eu une tempête de neige et même si le temps qui m’avait été alloué pour l’entrevue était épuisé, M. Reeves ne pouvait pas partir, donc son assistant nous a apporté deux coupes de vin et nous avons finalement parlé pendant deux heures, raconte-t-il. C’est complètement fou quand j’y repense. »
Il faut dire aussi que le domaine de l’eau intéresse grandement la communauté scientifique, et Source en profite. « Nous avons d’ailleurs poussé les travaux de beaucoup de chercheuses et de chercheurs, indique André Dumouchel. Par exemple, pendant la pandémie, nous avons fait une première page du magazine avec la mesure des indicateurs associés à la COVID-19 dans les eaux usées comme indicateur précoce de la propagation du virus dans la population. Ça avait aidé à faire connaître l’initiative à tous les paliers de gouvernement. »
Le fondateur est aussi fier du reportage La toilette n’est pas une poubelle, publié l’hiver dernier. « Les personnes de l’industrie avaient besoin d’expliquer la réalité des usines de traitement des eaux usées, avec tout ce que les gens jettent dans leur toilette, explique-t-il. Ça avait fait réagir. C’est important de mettre de l’avant ces gens qui travaillent dans l’ombre. C’est un milieu difficile : ça pue dans ces usines ! Mais leur boulot est important. »
Maintenant, le magazine réussit à aller chercher des journalistes professionnels pour réaliser les reportages. Les textes peuvent aussi mieux briller, maintenant que le nouveau site Web a été créé. « Toute cette évolution ne serait pas possible dans le soutien fidèle des nombreux annonceurs actifs dans le domaine de l’eau, affirme André Dumouchel. Sans eux, il n’y a pas de magazine. »
« Nous avons fait une première page du magazine avec la mesure des indicateurs associés à la COVID-19 dans les eaux usées […] Ça avait aidé à faire connaître l’initiative à tous les paliers de gouvernement. »
— André Dumouchel, éditeur des magazines Source et 3Rve