Réseau EnvironnementSolutions pour un financement durable de nos services d’eau

Solutions pour un financement durable de nos services d’eau

Par Mathieu Laneuville

L’eau est l’or bleu de notre siècle. Pourtant, le Québec ne gère pas encore son eau comme une richesse devrait être gérée. Malgré une diminution notable de la quantité d’eau distribuée ces 20 dernières années, le Québec trône toujours au sommet du classement canadien, et même mondial, pour sa distribution d’eau par habitant. L’eau potable est un service essentiel auquel doit avoir accès l’entièreté de la population. Toutefois, sous nos chaussées, nos infrastructures d’eau potable et d’assainissement des eaux usées se rapprochent de plus en plus du point de non-retour.

Un portrait préoccupant pour l’avenir

Nous le voyons à plusieurs endroits au Québec, le déficit chronique de financement de nos infrastructures d’eau expose non seulement la population à un risque croissant de ruptures de service, mais il entrave aussi le développement de plus en plus de municipalités ainsi que la rénovation et la construction d’infrastructures publiques pour lesquelles les besoins sont criants. La logique d’investissement vaut aussi pour assurer la qualité des rejets de nos ouvrages d’assainissement des eaux usées dans l’environnement, sans compter les dommages causés par une gestion inadéquate des eaux pluviales, les précipitations étant de plus en plus fréquentes et intenses chaque année. Actuellement, seulement 42 % des coûts des services d’eau sont recouvrés par les municipalités, ce qui fragilise leur capacité à entretenir leurs infrastructures et qui remet en question la viabilité de nos services d’eau sur le long terme, alors que le déficit de maintien des actifs (DMA) qui les concerne atteint désormais 18,2 milliards de dollars.

Des propositions concrètes pour remédier à la situation

Un investissement soutenu dans nos infrastructures d’eau et une révision de leurs mécanismes de financement sont plus que jamais essentiels pour assurer la résilience des services d’eau du Québec face à une demande croissante couplée aux conséquences des changements climatiques. C’est pourquoi Réseau Environnement a fait appel à l’expertise de ses membres, spécialistes en eau issus des secteurs publics, privés et académiques, afin de soumettre des propositions concrètes à nos décideurs pour éponger le DMA et assurer la durabilité financière de nos services d’eau. Voici un résumé de nos cinq recommandations.

Viser l’autofinancement des services d’eau municipaux d’ici 2032

Il est primordial d’établir un mode de financement qui prend en compte le coût intégral des services d’eau, incluant la maintenance et le renouvellement des infrastructures. Nous recommandons que les municipalités mettent en place des réserves financières dédiées aux infrastructures d’eau et des seuils minimums d’investissement pour financer le maintien d’actifs. Ainsi, on pourrait éviter les déficits à long terme et les paiements d’intérêts sur la dette contractée, lisser les revenus pour faire face aux pointes d’investissement sans surcharger les contribuables et garantir un financement prévisible et stable.

Viser l’autofinancement des services d’eau municipaux d’ici 2032

Il est primordial d’établir un mode de financement qui prend en compte le coût intégral des services d’eau, incluant la maintenance et le renouvellement des infrastructures. Nous recommandons que les municipalités mettent en place des réserves financières dédiées aux infrastructures d’eau et des seuils minimums d’investissement pour financer le maintien d’actifs. Ainsi, on pourrait éviter les déficits à long terme et les paiements d’intérêts sur la dette contractée, lisser les revenus pour faire face aux pointes d’investissement sans surcharger les contribuables et garantir un financement prévisible et stable.

Financer le déficit et la mise aux normes par les gouvernements

Nous recommandons également que les gouvernements du Québec et du Canada financent le DMA actuel et la mise aux normes des infrastructures. Toutefois, cet investissement devrait être conditionnel à un engagement des municipalités vers le modèle d’autofinancement progressif. Une fois le DMA comblé et que les municipalités auront atteint une certaine autonomie financière, les gouvernements supérieurs n’auront plus à compenser pour le financement de ces dépenses courantes.

Assurer un accès équitable à des services d’eau de qualité aux ménages à faible revenu

Il sera essentiel de bonifier les aides financières octroyées aux ménages à faible revenu afin de les aider à faire face aux augmentations de coûts engendrées par un juste recouvrement des coûts des services d’eau. Ces bonifications permettront aux ménages les plus vulnérables d’obtenir le soutien nécessaire pour s’acquitter de leurs factures de services municipaux sans empirer leur situation financière.

Implanter une tarification volumétrique pour les industries, commerces et établissements (ICI)

Les ICI doivent contribuer équitablement au financement des services d’eau par une tarification basée sur leur consommation réelle. Cette approche favoriserait une utilisation plus responsable de la ressource tout en permettant aux entreprises de mieux contrôler le coût de leur facture municipale.

Se diriger vers une approche volontaire pour les compteurs d’eau et la tarification volumétrique résidentielle

Pour favoriser une gestion durable de l’eau, il est important que les citoyennes et les citoyens prennent d’abord conscience de l’ampleur de leur propre consommation et des coûts qu’elle engendre à la société. Afin de recueillir davantage de données de consommation que ce qu’il est possible d’obtenir actuellement, nous recommandons l’installation de compteurs d’eau résidentiels par les municipalités sur une base volontaire et individuelle dans les résidences existantes et de manière obligatoire dans les nouvelles résidences. À moyen terme, nous recommandons que les citoyennes et les citoyens aient la possibilité, toujours sur une base volontaire, d’opter pour une tarification volumétrique de leur consommation d’eau1.

Un appel à l’action

Face au DMA des infrastructures en eau qui se creuse, on pourrait baisser les bras et se dire que ça fait longtemps que c’est comme ça et qu’on ne peut rien y faire, mais ce serait mal connaître les membres de Réseau Environnement !

Le statu quo en eau n’est plus une option au Québec. Notre eau est une richesse collective. C’est maintenant à nos décideurs – municipaux, provinciaux et fédéraux – de s’engager dans cette réforme cruciale. Réseau Environnement sera présent pour les accompagner dans leur passage à l’action.

  1. Inciter à une consommation responsable devient d’autant plus pressant pour les municipalités dont la capacité des infrastructures est en voie d’être atteinte que celles ou la ressource en eau est à risque. La mise en place de compteurs d’eau permet de diminuer le risque de dépasser ces capacités et ainsi d’éviter des coûts substantiels à l’ensemble de la population. C’est pourquoi nous recommandons que les municipalités qui ont atteint 90 % ou plus de leur capacité instaurent une tarification volumétrique de l’eau pour tous leurs résidents

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